Un voyage nommé désir

Un voyage nommé désir

Frédérique-Sophie Braize

Editions Presses de la Cité (Terre de France)

467 pages

Lu le 15 mai 2022

Là-haut, sur l'alpage savoyard où elles vont rester jusqu'à la fin de cet été 1917, trois amies font la rencontre de Vincenzo, un soldat italien qui va bouleverser leur vie.
Péroline, mère de famille, est sans nouvelles de son époux. La pieuse Anne-Céleste n'a reçu qu'une lettre, sibylline, de son fiancé sur le front. Rose, jolie fleur en âge de convoler, veille sur sa fratrie orpheline. Elles sont en manque de bras solides pour abattre leur travail le jour et... pour étreindre leur corps la nuit. L'attitude énigmatique de l'Italien, à la fois aventurier séducteur et âme consolatrice, les délivrera, qui d'un mari violent, qui d'un prêtre, qui du poids du devoir.
Emportées dans les tourmentes de l'Histoire et du plus rocambolesque fait divers du siècle, les trois amies vont aussi voyager au coeur du désir féminin...
Une ode sensuelle et magnifique aux femmes.

J'ai acheté ce roman lors du salon du livre féminin à Hagondange, le 19 février dernier.
Curieuse de découvrir la plume de Frédérique-Sophie Braize, dont je voyais de plus en plus de posts sur les réseaux sociaux nous parler avec enthousiasme de ses derniers romans, je n'ai pas résisté à l'envie de rencontrer l'auteure et de me procurer à mon tour ses livres.

Je vous parle aujourd'hui d'une lecture qui m'a transportée. 
D'abord par la plume de Frédérique-Sophie, qui par son côté désuet et riche m'a charmée et l'a rendue tellement poétique. L'écriture est fluide, je n'ai pas vu le temps passer lors de ma lecture, et pourtant j'ai essayé de la faire durer.
Puis par le décor sur plus de la moitié du roman, où l'on se retrouve sur l'alpage en Haute-Savoie comme chaque été en compagnie des femmes du village d'En-Bas. Ce décor de montagne nous fait voyager, nous offre une parenthèse de vie comme un second souffle. 
Enfin, j'ai été totalement conquise par l'histoire de ces trois femmes que nous allons suivre. Eté 1917, Péroline, 32 ans, mère de 3 enfants, asservie à un mari violent, Anne-Céleste, 24 ans très pieuse, au service d'un curé despotique, dans l'attente du retour de la guerre de son fiancé Jean-Gaston, et la flamboyante Rose, qui veille sur ses frères depuis ses 18 ans, à la mort de ses parents et qui rêve à l'amour, montent à l'alpage pour la troisième année consécutive sans homme.
A cela s'ajoute, Vincenzo, permissionnaire italien, ami de Jean-Gaston, qui connait donc l'histoire de ces femmes, "privées des bras solides pour abattre leur travail le jour et étreindre leur corps la nuit". Il décide de passer sa permission à l'alpage et d'être présent pour elles, pour le travail et le reste si elles y consentent.

Cet été sera une parenthèse pour tous : un été de confidences pour Vincenzo et les femmes sur les drames de leur vie, un été de joie et bienveillance pour des enfants qui découvrent qu'un homme peut être bon, un été de plaisir et d'abandon pour des femmes tenues sous le joug d'un système patriarcal, un été de secrets partagés. 

Mais les trois femmes resteront-elles unies par leur secret de retour au village, face au Père Pudeur? Leur amitié va-t-elle résister quand la parenthèse se referme et que la dure réalité de leur vie reprend le dessus?

L'auteure ne s'arrête pourtant pas là. Elle nous fait encore cadeau du fait divers le plus important de ce début de siècle en nous relatant par la voix de Vincenzo le vol de la Joconde en août 1911, sans oublier bien sûr la catastrophe ferroviaire qui a eu lieu le 17 décembre 1917.

Je vous en parle aujourd'hui et je me dis "quelle lecture passionnante!"
Tellement de thèmes y sont abordés : la guerre, la solitude des femmes et leur sororité face à  l'inhumanité des hommes, le féminin et sa sensualité, les magnifiques paysages de montagne.
L'auteure a réussi à m'envelopper de ses mots, j'étais avec ses femmes sur la montagne et dans leur douleur, j'ai été très touchée par leur histoire en tant que femme.
Et merci pour cette magnifique fin.
Vous ne pouvez pas passer à côté de ce roman. 

"Et c'étaient justement ça, une sororité. Une communauté de femmes solidaires qui pleuraient ensemble la perte du bébé de Péroline parce que sa mort prématurée disait toutes leurs pertes."

Note : 18/20




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